STOP A LA LOI DU SILENCE

vendredi 28 juillet 2017

Y’a pas d’école pour être PARENTS


« Etre parent est un dur métier », un métier pour lequel il n’y a pas d’école. Et quand de surcroît notre enfant présente des difficultés, que l’on appelle cela « troubles du comportement » ou « trouble du développement » ou « trouble de la personnalité »... de la même façon que pour n’importe quel handicap, aucun parent n’y est préparé.

Chaque individu possède en lui un volcan toujours en activité. C'est une force de création extraordinaire comme cela peut être une force de destruction sans pareille. C'est l'image du soleil qui donne la vie ou bien qui brûle, la pluie qui abreuve ou bien qui noie, la force qui bâtit des empires ou celle qui anéantit la vie.
Si nous laissons aller notre volcan sans possibilité de contrôle, il risque de dévaster notre vie et celle de nos proches.
Si nous en maîtrisons la puissance, nous serons à même de créer le bonheur et la vie autour de nous. (Hérvé Desbois)

Le regard de l’autre

Dans notre société contemporaine, qui n’offre pas de sécurité affective, et où il ne fait pas bon être adulte, l’environnement interne (familial) et externe (environnemental) n’apporte pas à l’adolescent la stabilité dont il aurait tant besoin.

Or l’adolescence est une période trouble par essence. L’adolescence est une période charnière, coûteuse (psychiquement), car conflictuelle pour l’enfant et pour les parents.

Si l’enfant développe alors des troubles du comportement, il déstabilise l’entourage, épuise son environnement et provoque des réactions négatives et d’incompréhension.

En effet, les jeunes qui présentent des troubles du comportement n’attirent pas a priori la compassion : Ils dérangent « l’ordre des choses ». Ne sont-ils pas mal éduqués ? Et les parents de ces enfants ne sont-ils pas un peu responsables, quelque part ? 

Mon enfant était Borderline

J’étais totalement ignorante sur ce trouble du comportement. Pour moi, à l’adolescence, Céline était devenue dépressive, voire même suicidaire. Ce n’est qu’après sa mort, à la lecture des rapports médicaux la concernant que j’ai appris à comprendre cette terrible souffrance qu’elle portait en elle.

Je la rabrouais sur sa conduite, estimant qu’elle se mettait trop souvent en danger mais elle me rassurait toujours en me disant: « Mais Maman, t’affoles pas! Tout le monde fait çà maintenant. Y’a pas de risque » 

Les comportements qui font partie du champ suicidaire inconscient sont extrêmement nombreux : abus de drogues, d’alcool, comportements antisociaux, les accidents de la route (moto), jeux du foulard, conduites à risque…

Toutes ces conduites représentent des modalités de fuite, de mise à distance, d’une tension interne. Le doute et l’incertitude quant à sa propre identité amènent l’adolescent à vivre, à se sentir exister en partant ailleurs, à rechercher de nouvelles identifications qu’il ne peut pas rencontrer là où il vit. Mon enfant vivait dans sa bulle, utilisant pour son « envol » des produits illicites…

J’ai évoqué mes craintes mais mon entourage, pensant sans doute me tranquilliser, me disait. « Ne t’en fais pas, les jeunes fument souvent un pétard de temps en temps, ils ne sont pas drogués pour autant » 

Borderline, un trouble bien méconnu

Le terme “trouble de l’attachement” ou “enfant passoire” n’est employé en théorie que pour des enfants.
Pour les jeunes de plus de 18 ans, ce trouble s’appelle “BORDERLINE”.

Les caractéristiques de ce trouble sont :

· Le changement d’humeurs
L’humeur peut basculer d’un moment à un autre, et même tellement soudainement que les personnes de l’entourage n’ont aucune idée de ce qui a pu faire basculer cette humeur. Souvent cette inversion d’humeur est qualifiée “d’hypersensibilité”. L’humeur peut changer du très heureux vers le profondément malheureux ou par exemple vers une irritabilité intense.

·  L’impulsivité
Les personnes “Borderline” prennent souvent leurs décisions de manière impulsive. Sans aucune réflexion sur les conséquences, elles ont décidé par exemple de suivre une formation qui, si peu de temps après ne plait pas, est donc aussitôt arrêtée. L’impulsivité s’exprime souvent aussi à travers des troubles alimentaires, le gaspillage d’argent ou une consommation démesurée de boissons ou de drogues. 

·  Les perturbations d’identité :
Beaucoup de sujets Borderline ont peu de confiance en soi. Ils ne savent pas bien ce qu’ils veulent faire de leur vie et ont une instabilité de l’image de soi ou de la notion de soi.

·  Les sentiments chroniques de vide :
Beaucoup de personnes Borderline ont une “impression de vide”. Comme si elles se sentaient coupées des choses.

·  La manière de penser tout blanc ou tout noir.
Le borderline voit autrui SOIT comme quelqu’un de formidable, SOIT comme quelqu’un complètement sans valeur et il alterne ainsi entre les positions extrêmes d’idéalisation et de dévalorisation. Pour lui, il n’a que très peu ou aucune nuance de gris entre le noir et le blanc.

· L’automutilation :
Parfois, les tensions montent tellement que le borderline s’abime lui-même, et pas toujours “inconsciemment”. Parfois, l’automutilation se produit dans des situations vécues comme une sorte d’ivresse.

·  Les phénomènes psychotiques et dissociatifs
Les personnalités borderline vivent parfois des états de courte durée. La plupart du temps, ces psychoses sont transitoires et passent après quelques heures. Souvent, elles se manifestent par une méfiance démesurée, le fait d’entendre des voix, d’être dans l’embarras.
 
La dissociation se manifeste sous différentes formes. Le patient peut avoir l’impression de ne plus être dans la réalité et que tout passe à coté de lui sans qu’il y prenne part (déréalisation). 

Il peut aussi avoir le sentiment de vivre dans un corps duquel il ne sent rien (dépersonnalisation). 

Il arrive aussi par exemple qu’il se rende quelque part, mais qu’il ne sait plus comment il s’y est rendu, ou même qu’il y est allé. Ces situations peuvent être des expériences assez angoissantes.
 
La dislocation est un état de conscience modifié, comme si différentes fonctions du cerveau n’étaient plus en accord. L’entourage peut parfois apercevoir des dissociations par le fait qu’il observe que la personne borderline n’est plus présente en esprit ou qu’elle donne une impression d’absence.

·  La peur de l’abandon
Beaucoup de patients borderline ont une frousse bleue de l’abandon. Ils font l’impossible pour l’éviter
·  Les colères inappropriées.

La prévalence du trouble de la personnalité borderline est importante, estimée à environ 2% de la population générale (aux alentours de 10% de la population générale des adolescents) et entre 15 et 25 % de l’ensemble des patients consultant en Psychiatrie. 

Typiquement, le tableau clinique de ce trouble de la personnalité débute à l’adolescence, et souvent de façon très bruyante : surmortalité, tentatives de suicide itératives et graves (5% de décès par suicide avant l’âge de 30 ans), automutilations, épisodes psychotiques aigus transitoires (dépersonnalisation, déréalisation), conduites impulsives (prises de risque, vols, rixes, colère non contrôlée …) et addictives (prises de drogues, alcoolisations, crises de boulimie …), masquant ainsi le reste de la symptomatologie (expression d’une identité de soi diffuse, sentiment de vide persistant, relations interpersonnelles violentes et chaotiques, lutte pour éviter l’abandon, fluctuations rapides de l’humeur …).

La prise en charge de ces adolescents borderline est longue, difficile, associe de multiples modalités thérapeutiques (prescriptions médicamenteuses, psychothérapies, nombreuses hospitalisations en situation de crise aiguë, séjours prolongés en établissement de soins ou de soins-études…), et reste peu codifiée. 

 Dr Bernadette Grosjean est médecin psychiatre spécialisée dans le trouble borderline. 
La psychothérapie est le traitement essentiel des troubles borderline car il faut traiter les problèmes de dysrégulation émotionnelle et de comportement dans un contexte relationnel" martèle le Dr Bernadette Grosjean 

Le traitement psychothérapeutique des troubles borderline est de longue durée (les spécialistes s'accordent sur une durée de 3 à 5 ans, voire plus). " Il faut du temps et des expériences émotionnelles correctrices pour modifier les comportements et les souffrances existentielles intrapsychiques comme les sentiments de vide et d'ennui" expliquent les Dr Grosjean et Desseilles. A terme, l'objectif est que le patient devienne son propre thérapeute. " Les patients ne rechutent pas tellement, ou de manière moins dramatiques, une fois qu'ils ont appris de nouvelles compétences pour réguler leurs émotions par le biais de la psychothérapie" informent les psychiatres.
Concrètement, la forme de la psychothérapie recommandée dépend des symptômes et de la sévérité de la maladie.
Aussi, dans les cas les plus "sensibles", notamment lorsque la vie du patient est en danger (10 % des patients borderline meurent de suicide ou des conséquences d'actes autodestructeurs), une thérapie dialectique comportementale (TCD) s'avère indiquée. " Elle a pour but d'aider la personne à identifier et à contrôler ses émotions par le biais d'apprentissage de nouvelles compétences émotionnelles" explique le Dr Grosjean. " On s'attaque ainsi d'emblée aux comportements qui mettent la vie en jeu" souligne-t-elle.

Rechercher des épisodes traumatiques
Heureusement, " après un an de traitement, quelle que soit la thérapie utilisée, ces comportements sont généralement sous contrôle" souligne le Dr Grosjean. Une fois que c'est le cas, le patient peut entamer une phase de nature "psychodynamique" pour une analyse plus en profondeur des souffrances intrapsychiques.
On va alors par exemple aborder les traumas et les problèmes plus existentiels. Quand il y a une pathologie borderline, il y a eu en effet souvent des épisodes traumatiques : maltraitance, négligence ou parfois simplement des circonstances de vie chaotiques" expliquent les spécialistes.

Les médicaments
Il n'existe pas de médicaments spécifiques pour traiter les troubles borderline 6. " Trop souvent, il y a un problème de diagnostic erroné : on dit aux patients qu'ils sont bipolaires et on leur donne des médicaments pour ce trouble. Évidemment, le traitement n'a pas d'effet sur le trouble de personnalité borderline à proprement parler" déplorent les auteurs.

Le traitement médicamenteux vient en renfort seulement, lorsqu'il y a une dépression profonde (prescription d' antidépresseurs), des troubles de type paranoïa ou dissociatifs importants (une très légère dose d'antipsychotiques peut alors être bénéfique).

 


 



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